Stendhal

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te dйrobйe du palais. Clйlia perdue et enfant retrouvй. Clйlia dont il a tant rкvй et dont la voix chиre sortie de lombre lui murmure soudain ces simples mots : "Entre ici, ami de mon coeur."

Et Stendhal : "Nous demanderons la permission de passer sans dire un mot sur un espace de trois annйes."

Pourtant, malgrй cette dйrobade, la charge sensuelle demeure forte chez Stendhal, mкme si elle nest йvoquйe que par les pieds nus de la comtesse Curial, la main de Mme de Rйnal, les йpaules de Mme de Chasteller ou lappel de Clйlia dans la nuit. Au moment oщ Fabrice, de la fenкtre de sa prison, apparaоt а Clйlia qui se trouve dans la cour de son palais, il remarque qu"elle rougissait tellement que la teinte rose sйtendait rapidement jusque sur le haut des йpaules" et cela suffit а le remplir despoir.

Cest encore une des singularitйs de Stendhal que ce romancier de la chasse au bonheur ait йtй hantй toute sa vie par lidйe de la mort.

La mort, il en fait la cruelle expйrience dиs lвge tendre. Elle le frappe enfant а travers les siens. Il perd sa mиre, on le sait, alors quil a sept ans et ce coup du destin le bouleverse. A tel point quon peut dire quil y a eu deux pйriodes dans sa vie affective : avant la mort de sa mиre et aprиs.

De 1828 а 1840 toutefois il nйtablit pas moins de trois douzaines de testaments. La vieillesse le hante autant que la mort et il nous raconte au dйbut dHenri Brulard comment, sapercevant quil va avoir bientфt cinquante ans, il inscrit cette constatation а lintйrieur de sa ceinture. Simple originalitй sans signification? La pudeur lempкche den dire plus mais son cousin Romain Colomb parle pour lui : "Cette dйcouverte laffligea comme aurait pu le faire lannonce inopinйe dun malheur irrйparable." Ses romans aussi : "Le comte [Mosca] avait atteint la cinquantaine. Cest un mot bien cruel et dont peut-кtre un homme йperdument amoureux peut sentir tout le retentissement."

En dehors des deuils personnels sa premiиre enfance est marquйe par les violences de lйpoque rйvolutionnaire et sa jeunesse par les guerres de lEmpire. La mort, il la voit nue sur les champs de bataille de lEurope : villes incendiйes, ventre ouvert des chevaux, blessйs brыlйs vivants, cadavres dйfigurйs des soldats sur lesquels passent les voitures ou que lon jette dans la riviиre.

Pourtant, mкme а la guerre, le "touriste" ne perd pas ses droits. Prиs dEnns, un incendie lui arrache cette notation dans son journal : "A cela prиs lincendie йtait superbe." A Neubourg il marque encore : "Le tout formait un paysage superbe." Mкme curieuse joie de Fabrice а Waterloo : "Fabrice йtait encore dans lenchantement de ce paysage curieux."

Les rйflexions sur la beautй des incendies ou le spectacle insolite de la canonnade pourraient apparaоtre comme un divertissement grauit desthиte, si elles ne dйnotaient pas au contraire une volontй de distanciation par rapport а la guerre et а ses horreurs qui ont profondйment marquй Stendhal. Le goыt du beau lui sert ici de thйrapeutique, cest un moyen doublier la mort, la peur de la souffrance qui mиne а la mort, et la peur den avoir peur.

Selon Mйrimйe, Stendhal naimait pas а parler de la mort, "la tenant pour une chose sale et vilaine plutфt que terrible".Dans Rome, Naples et Florence, lйcrivain lui-mкme dit quelle est un "scandale abominable", et il note dans son journal : "La pilule de la mort est amиre, il faut que lorgueil la cache, adoucisse le goыt." En faisant appel а lhumour par exemple. Il aime а citer le mot du chevalier de Champcenetz, demandant au pied de lйchafaud en 1794 "si on ne pourrait pas se faire remplacer". Et dans sa prison Julien Sorel se souvient de cet autre mot de Danton que lui avait rapportй le comte Altamira : "Cest singulier, le verbe guillotiner ne peut pas se conjuguer а tous les temps. On peut bien dire : je serai guillotinй, tu seras guillotinй, mais on ne dit pas : jai йtй guillotinй."

Puisquil nest au pouvoir de personne dйchapper а la loi commune, du moins Stendhal nous explique-t-il - il a vingt et un ans - la mort qui lui paraоt la plus convenable, la plus propre, cest celle oщ "le corps ne triomphe point", qui se passe simplement, sans souffrance, dans un beau paysage. Celle de Brutus par exemple, telle que la conte Plutarque : "Sa mort prиs de cette petite riviиre aux abords trиs йlevйs en-delа de ces grands arbres, sous le ciel trиs йtoilй de la Macйdoine, prиs de cette grande roche oщ il sйtait assis dabord, est la plus touchante pour moi de toutes celles que je connais. Elle a quelque chose de divin. Le corps ny triomphe point. Cest une вme dange qui abandonne un corps sans le faire souffrir. Elle senvole."

Tout se passe comme si Stendhal, dans son oeuvre romanesque, avait dйcidй de mettre entre parenthиses cette inconvenance, cette grossiиretй : la mort.

Il refuse de la dйcrire et lexclut de son univers crйateur. Ne pouvant la supprimer, il la sublime pour lexorciser. Sans doute tous ses hйros meurent jeunes, presque toujours tragiquement, ou se laissent-ils mourir sils ne se retirent pas dans une chartreuse. Mais cette sortie de scиne est discrиte, comme dйsincarnйe, tout se passe simplement, mкme sil sagit dune exйcution capitale, proprement, poйtiquement: cest leuthanasie littйraire qui est la maniиre de Stendhal de se rйvolter contre la mort.

A lopposй du christianisme, la volontй paпenne de Stendhal dexorciser la mort, au point mкme parfois den faire une fкte, apparaоt avec йclat dans toute son oeuvre romanesque, par un phйnomиne de compensation en rupture avec la rйalitй.

Dans Armance, le suicide dOctave de Malivert, qui dйnoue la tragйdie, est sans doute le plus caractйristique de cette euthanasie littйraire. Sa mort est voulue, elle est douce, belle, exempte de souffrance, elle se passe au large de la Grиce dans une nuit constellйe dйtoiles : "Jamais Octave navait йtй sous le charme de lamour le plus tendre comme dans ce moment suprкme ... Un mousse du haut de la vigie cria : Terre ! Cйtait le sol de la Grиce et les montagnes de la Morйe que lon apercevait а lhorizon. Un vent frais portait le vaisseau avec rapiditй. Le nom de la Grиce rйveilla le courage dOctave ; Je te salue, se dit-il, ф terre des hйros ! et а minuit le 3 mars, comme la lune se levait derriиre le mont Kalos, un mйlange dopium et de digitale prйparй par lui dйlivra doucement Octave de cette vie qui avait йtй pour lui si agitйe. Au point du jour on le trouva sans mouvement sur le pont, couchй sur quelques codages. Le sourire йtait sur ses lиvres et sa rare beautй frappa jusquaux matelots chargйs de lensevelir."

Octave a choisi sa mort, mais non pas Bйatrix Cenci, elle, puisque meurtriиre de son pиre pour sauver son honneur, elle est atrocement torturйe avant dкtre conduite au supplice. Voici pourtant en quels termes Stendhal dйcrit son enterrement : "A neuf heures et quart du soir, le corps de la jeune fille recouvert de ses habits et couronnй de fleurs avec profusion, fut portй а Saint-Pierre in Montorio. Elle йtait dune ravissante beautй; on eыt dit quelle dormait..." Avec parfois, mкme dans les moments les plus tragiques, un clin doeil au lecteur : "Pendant quon mettait en ordre la mannaja pour la jeune fille, un йchafaud chargй de curieux tomba et beaucoup de gens furent tuйs. Ils parurent ainsi devant Dieu avant Bйatrix."

Voici maintenant Julien Sorel, alors quil est dans lantichambre de la mort et quil connaоt enfin, nous lavons vu, le bonheur et lamour. Quand il entre dans la salle oщ on va le juger, ce qui le frappe cest "lйlйgance de larchitecture". Et le jour de son exйcution "marcher au grand air fut pour lui une sensation dйlicieuse. "Jamais cette tкte navait йtй aussi poйtique, nous dit Stendhal, quau moment oщ elle allait tomber. Les plus doux moments quil avait trouvйs jadis dans les bois de Vergy revenaient en foule а sa pensйe et avec une extrкme йnergie. Tout se passa simplement, convenablement et de sa part sans aucune affectation."

Tout se passa simplement. Sauf pour Mathilde (merveilleuse Mathilde aussi) qui suivit Julien jusquau tombeau quil sйtait choisi, une petite grotte de la grande montagne dominant Verriиres - on voit le symbole - et "а linsu de tous, seule sa voiture drapйe porta sur ses genoux la tкte de lhomme quelle avait tant aimй". Tout se passa simplement pour Mme de Rйnal qui fut fidиle а la promesse quelle avait faite : "Elle ne chercha en aucune maniиre а attenter а sa vie. Mais trois jours aprиs Julien, elle mourut en embrassant ses enfants."

Il faut un trиs grand talent а Stendhal pour faire de dйnouement sanglant - par une йtrange alchimie qui transforme la souffrance en joie, lamertume en douceur - un poиme а la gloire de ses hйros, une espиce de tragйdie optimiste oщ lon oublie la mort pour ne retenir que leur noblesse retrouvйe. Tels quen eux-mкmes enfin...

Mais cest peut-кtre dans La Chartreuse de Parme que le romancier porte а u