Stendhal

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ion dautodйfense de lindividu а cette йpoque prйcisйment - celle de la Restauration et de la monarchie de Juillet - contre les sentiments bas, les ambitions subalternes, lamour de largent, lintolйrance et larbitraire du despotisme : "Tout ce qui йtait tyrannie, йcrit Stendhal, me rйvoltait et je naimais pas le pouvoir."

Cette aspiration а la libertй dйpasse le niveau de la revendication individualiste. Elle est porteuse dun espoir plus vaste qui rйconcilierait lhomme rйvoltй avec la sociйtй. Mais cet espoir est exclu dans un systиme fondй sur le mensonge et lobscurantisme. Quil sagisse de lItalie fйodale, de la France de la Restauration, ou de la monarchie de Juillet, partout cest lhypocrisie qui fait loi. Quel est le leitmotiv de lenseignement dispensй par la Congrйgation sous Charles X : "Ce sont les livres qui ont perdu la France." Quelle est la philosophie en honneur dans les classes dirigeantes а Parme ? "Le marquis del Dongo professait une haine vigoureuse pour les Lumiиres : ce sont les idйes, disait-il, qui ont perdu lItalie." Quel est le conseil donnй а Fabrice par le bon abbй Blanиs (dйtestй par le marquis "parce quil raisonne trop pour un homme de si bas йtage") : "Si tu ne deviens pas hypocrite, lui disait-il, peut-кtre tu seras un homme." Quelle est la rиgle de conduite impйrative dans le noble salon de lhфtel de La Mole oщ Julien, qui fait ses premiers pas dhomme introduit dans le monde, saperзoit que "la moindre idйe vive semblait une grossiйretй" ? Stendhal nous rйsume cette rиgle non йcrite en paraphrasant Beaumarchais : "Pourvu quon ne plaisantвt ni de Dieu, ni des prкtres, ni du roi, ni des gens en place, ni des artistes protйgйs par la cour, ni de tout ce qui est йtabli, pourvu quon ne dоt de bien ni de Bйranger, ni des journaux de lopposition, ni de Voltaire, ni de Rousseau, ni de tout ce qui se permet un peu de franc-parler, pourvu surtout quon ne parlвt jamais de politique, on pouvait librement raisonner de tout."

Pour Stendhal, le pouvoir engendre inйvitablement la courtisanerie et il йcrit joliment : "Le chevalier bйgayait un peu parce quil avait lhonneur de voir souvent un chevalier qui avait ce dйfaut."

Mais cest peut-кtre le personnage de Lamiel - sorte de double fйminin de Julien Sorel - qui manifeste avec le plus dйclat son dйgoыt de limposture et son refus dкtre dupe des fausses apparences : "Le premier sentiment de Lamiel а la vue dune vertu йtait de croire а une hypocrisie." Elle pousse mкme jusquа labsurde cette volontй dкtre sincиre pour sa part, quoi quil en coыte, et dкtre aimйe en retour pour elle-mкme et non seulement pour sa beautй.

Cest le singulier йpisode du "vert de houx" lorsquelle frotte une de ses joues avec ce produit pharmaceutique qui a la propriйtй denlaidir momentanйment les plus charmants visages. Elle veut vйrifier si le jeune duc qui est amoureux delle rйsistera а cette йpreuve. Estimant que lamour vйritable ne peut se contenter de lapparence, elle entreprend ce jeu singulier, un peu comme cette hйroпne de lAstrйe qui se dйchire le visage avec son diamant pour sassurer quelle est rйellement aimйe. Telle est lexigence absolue de la passion selon Stendhal. Telle aussi la mйfiance profonde de ses hйros а lйgard de ce qui leur paraоt mensonge, truquage, hypocrisie dans "cet ignoble bal masquй quon appelle le monde" (Lucien Leuwen, cap. 17).

Aprиs avoir dйcouvert que "le monde" - la sociйtй de la Restauration et de la monarchie de Juillet - est un ignoble bal masquй, aprиs avoir mis а nu le fonctionnement dun systиme fondй sur lhypocrisie et la tyrannie de largent, quelle attitude va adopter le hйros stendhalien а la recherche du bonheur ?

La rйponse а cette question est liйe а lappartenance sociale des hйros : constatation qui pourrait apparaоtre comme un truisme si la littйrature jusquа lui navait pas - pour des raisons historiquement comprйhensibles - а peu prиs totalement masquй cet aspect des choses. Cest mкme lа un des traits qui font de Stendhal un romancier dйlibйrйment moderne : Le Rouge et le Noir par exemple est sans doute dans notre histoire le premier roman oщ le problиme de classe soit posй avec une telle nettetй, oщ il constitue la trame mкme de laction.

Il existe un dйnominateur commun а la plupart des personnages de Stendhal, mкme les plus diffйrents au premier abord, sans doute parce que lauteur a mis dans chacun deux beaucoup de ses rкves et de sa propre expйrience. Cependant leur comportement est fonction du milieu dont ils sont issus et pour tout dire de leur classe.

Toute sa vie, Henri Beyle a йtй un touriste passionnй du monde sous tous ses aspects. Mais il na pas seulemnt parcouru les routes dEurope. Dans son oeuvre, il nous invite а une vйritable exploration des classes sociales.

Tout se passe comme sil sйtait dit : "Quaurais-je pu кtre si jйtais nй paysan et pauvre sous la Restauration ?" Et il a crйй Julien Sorel. Fils de banquier sous Louis-Philippe, il aurait pu кtre Lucien Leuwen. Et Fabrice del Dongo, sil йtait nй noble dans une petite principautй dItalie au dйbut du XIXe siиcle. Il a mкme poussй la curiositй jusquа se dire : "Et si javais йtй une femme." Il a alors йcrit Lamiel, roman trиs en avance sur son йpoque et qui pose avec une audace а faire grincer les dents de beaucoup le problиme de lйmancipation de la femme.

Tous ses hйros, chacun а sa maniиre, se sentent йtrangers dans la sociйtй oщ ils vivent. Pour la mкme raison fondamentale. Mais ils rйagissent diffйremment compte tenu de leur origine sociale. A vingt ans, dans son Journal, Stendhal sadressait а lui-mкme cette mise en garde : "Ne pas prкter а des gens dune classe des idйes que lon na que dans une autre classe. Les gens du peuple parlent-ils souvent du bonheur comme nous lentendons ?" Julien Sorel est en butte а lhumiliation et а la pauvretй, mais non pas Fabrice ou Lucien Leuwen que le sort a comblйs. Ceux-lа sennuient, lautre non.

Cest en liaison avec la sociйtй de son temps que Stendhal pose le problиme de l"Ennui", ou si lon veut du "Mal du Siиcle". Lа encore sa position est rйsolument antimйtaphysique parce quil flaire la mystification derriиre la grandiloquence des attitudes. Tout dabord il na pas assez de sarcasmes а lйgard de ceux qui se sont conquis une cйlйbritй en se faisant les spйcialistes du dйsespoir. "Ce qui fait marquer ma diffйrence avec les niais importants ... qui portent leur tкte comme un saint sacrement, cest que je nai jamais cru que la sociйtй me dыt la moindre chose. Helvйtius me sauva de cette йnorme sottise. La sociйtй paie les services quelle voit."

Aprиs avoir ramenй le problиme du ciel sur la terre, il diagnostiqua le "Mal du Siиcle" en ces termes : "Les sentiments vagues et mйlancoqliques, partagйs par beaucoup de jeunes gens riches а lйpoque actuelle, sont tout simplement leffet de loisivietй."

Julien ne connaоt pas lennui parce quil a, comme dira plus tard Rimbaud, "la rйalitй rugueuse а йtreindre". Lucien ou Fabrice, au contraire, doivent lutter contre le monstre et ne peuvent y йchapper que par lamour.

Le hйros de Stendhal ne se croit pas lobjet dune malйdiction divine. Il ne sestime mкme pas personnellement victime de lincomprйhension ou de la mйchancetй des autres : "Je nai jamais eu lidйe que les hommes fussent injustes pour moi." Non, sa critique est plus fondamentale. Il rejette la rиgle du jeu de la sociйtй dans laquelle il vit. Julien, le plйbйien, parce que cette sociйtй lopprime, Fabrice ou Lucien - les privilйgiйs - parce quelle opprime les autres et quelle ne leur offre pas une raison de vivre. Lun est en lutte contre la sociйtй, les autres sont en marge de leur classe. Les uns et les autres, au fond, pour la mкme raison dordre moral : mкme ceux qui en tirent profit ne se satisfont pas de linjustice.

En peignant la rйalitй telle quelle est, Balzac nous donne, dans La Comйdie humaine, une critique fйroce de la sociйtй bourgeoise que la dйdicace de La Rabouilleuse dit "basйe uniquement sur le pouvoir de largent".

Cependant, jamais Balzac ne met en cause la lйgitimitй de lordre social, au plus haut degrй duquel il veut parvenir. Stendhal, quelles que soient les tentations, rйpugne а entrer dans le jeu : il reste un opposant politique.

Mais le monde йcrit par les deux romanciers est le mкme. La Comйdie humaine est bien lignoble bal masquй quйvoque Stendhal. Cest lйpoque de lambition effrйnйe, fille de la rйvolution industrielle.

Lobjectif cest darriver, sans кtre dйlicat sur le choix des moyens. Le premier commandement cest daccepter, les yeux fermйs, la rиgle du jeu, et il est caractйristique que Stendhal et Balzac utilisent exactement la mкme image pour en montrer la nйcessitй.

Quand la duchesse Sanseverina veut expliquer а son neveu Fabrice lattitude quil doit observer pour gr